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 [19] Aveugle.

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Carmicael
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Carmicael


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MessageSujet: [19] Aveugle.   [19] Aveugle. I_icon_minitime9/4/2012, 15:27

Ça fait un petit moment que j'ai cette idée de défi en tête, je me lance donc. Avant que vous ne soyez tous débordés par la rentrée, je vous propose de vous atteler à ceci, car je pense que notre sens principal nous empêche d'employer les autres, qui sont tout aussi enrichissants. Ecrire un texte d'un minimum quarante lignes, avec pour consigne de ne se servir, à aucun moment, du sens de la vue. Je ne donc voir aucun truc du style " là, trônait un arbre ", vous êtes aveugles, vous ne voyez rien. Mais cette seule consigne serait trop facile, j'impose donc un point de vue interne, et au moins une description. Le reste est à votre envie ! J'espère qu'il y aura des participants !

PS : Je ferai la partie " vote " quand il y aura plusieurs propositions.
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Akira
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Akira


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MessageSujet: Re: [19] Aveugle.   [19] Aveugle. I_icon_minitime9/4/2012, 18:35

Bon, alors, je le poste, mais je pense qu'il est a préciser "âme sensible s'abstenir", c'est vraiment glauque, enfin je trouve. x)

C’est douloureux. Se réveiller et ne plus rien voir. On cri, on gémit. Je ne sais pas, je ne sais plus. Où sont les couleurs ? Où est la lumière ? Pourquoi mes yeux délivrés de leurs paupières ne perçoivent rien ? L’obscurité m’emmène, m’entache et m’attache. Où cherchez ? Où voir ? Comment trouver lorsque la lumière est partie ? Rien, rien. Des chairs moites glissent, souffrent et agonisent sur ma peau sans que je ne puisse rien. Mon âme se révulse, se débat dans ce corps inutile. Les larmes se mêlent au sang qui ruisselle sur ce vêtement fragile, inutile. On cri, on gémit. Et il y a ce froid, ce froid transperçant mon bras, cette chaleur qui fuit, qui fuit par cette plais béante. La vie s’échappe, ruisselle dans cet endroit oppressant, le nourrissant plus encore, elle me fuit et aiguise le cocon terrible qui nous emprisonne. Tout est dur, tout est rugueux et l’on souffre. On souffre dans ce purgatoire écœurant. La roche s’enhardit et nous comprime, nous serre les uns contre les autres. Et ils y en a d’autre, ailleurs. Dans les plaintes aveuglantes, dans les respirations sourdes, dans cet halètement sans fin l’on distingue plus au loin d’autre souffrance. La pierre qui nous râpe laisse passer les murmures d’autres personnes, ces personnes qu’elle emprisonne ailleurs, dans d’autres cellules similaires aux nôtres. On cri, on gémit. Non. Ils crient et gémissent. Moi je ne peux rien, dans cette enveloppe qui ne répond plus. Moi je souffre et constate. Moi je souffre et subit. Et le silence auquel je suis contraint devient plus pesant encore. Et le sang devient plus présent, il emplit ma tête, il emplit ma bouche. Je flotte maintenant, une bulle se forme, j’entends mal. Je me noie dans ces bruits qui deviennent sourds. L’air, où est l’air ? Il fait chaud et le mal emplit ma tête. Je sens les corps frissonner d’une fièvre étrange. Je crois que je porte une morte. Un gémissement est partie, elle ne glisse plus, ne se meut plus. L’écœurante moiteur de sa peau sur la mienne transperce mon âme, et l’enveloppe. Mon pouls s’accélère, annonce l’angoisse en marche. Cette morte lourde et froide. Comme elle est froide dans l’enfer brûlant où nous sommes. Ma peau frissonne mais je ne peux rien. Ma tête veut exploser, je sens mon sang taper dans mes tempes, et je le sens fuir mon corps, ce corps mourant dont la vie ne veut plus. La coque se resserre plus encore, prenant ma main dans un craquement sec. Je crois que la morte se démantèle. Elle vient de perdre sa main avec la mienne et elle perd de sa raideur, je crois que plus rien ne la maintient, la roche a croqué son dos. Et le flot brûlant reprends de plus belle, et mon âme n’en peux plus et mon âme ne veut plus, elle veut fuir, partir loin, retrouver les couleurs. Mais l’on cri et gémit, et ces plaintes me maintiennent parmi eux. Je me révulse et convulse, je ne maîtrise plus rien la douleur occulte tout. Elle me foudroie. Mon âme veut abandonner, mes nerfs insistent. Une éternité passe. La morte s’incruste plus en moi à chaque pression nouvelle, créant de nouvelle plaie. Et ce parfum entêtant de mort et de cannelle, cette odeur envahissante de coquetterie qui va si mal à une morte. Mon âme pleure et mon corps souffre de cette affreuse symbiose, ce corps à corps me tue. Et je prie, je prie pour mourir. Pourtant un courant d’air frais parvient jusqu’à la main qui est encore entière...

-Là ! Il y a quelqu’un!
Les secouristes accourent, ils déblaient, s’inquiètent. On vérifie l’état des victimes. Elle est morte, mais lui…
-Il est vivant! Vite! Il faut le sortir de là.
Et le couple morbide est mis à nu. On emmène la morte avec les autres, et on emmène le vivant sur une civière :
-Il a eu de la chance! Si elle n’avait pas amortie une partie du poids de l’immeuble, il serait mort.

Ma poitrine se soulève, agonise et mon corps n’est plus rien, plus rien...
De la chance…
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Carmicael
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MessageSujet: Re: [19] Aveugle.   [19] Aveugle. I_icon_minitime9/4/2012, 19:34

C'est vrai que c'est un peu glauque, mais j'ai vraiment apprécié cette lecture ! Félicitations Akira ! =)
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BlackRabbit
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MessageSujet: Re: [19] Aveugle.   [19] Aveugle. I_icon_minitime9/30/2012, 18:13

Bon j'ai essayée, mais je flirte beaucoup avec la vue. Au pire, le défi ne sera pas valide XD. Bonne lecture

Défi : 19. Aveugle

Je suis une personne normale …
Je regarde droit devant moi et je suis assurée. Anonyme parmi les anonymes. Il n’y a qu’en m’approchant d’assez près que l’on peut découvrir ma différence, que mon regard est éteint, mes yeux sans vie et vides d'expressions. Les lunettes de soleil obsolètes, je vis au grand jour, fière et fixe l’horizon sans le voir.
Je suis aveugle, et mon monde est fait de noir. Mais la vie ne s’arrête pas là.

Acuité visuelle vous dites …
Même sans ce sens qui vous est indispensable, je vois bien plus de choses que vous ne pouvez l’imaginer. Certes, ma cécité ne m’offre rien, sinon un monde où mon corps en est le centre, mais les autres sens avaient si bien pris le relais à celui qui me faisait défaut que je n’y faisais pas attention. Je ressens chaque instant plus intensément que les personnes sensées voir et est capable de les décrire avec une précision chirurgicale.
Comme pour vous, un rayon de soleil me réchauffe. Il est chaud et sait se faire dur les mois d’étés. Il peut être semblable au feu mais est différent.
Comme pour vous, le tonnerre qui gronde et s’approche me fais frissonner. Alors que l’orage résonne en moi et fait vibrer tout mon être, le monde devient électrique.
C’est comme cela que je les « voient » en tout cas. L’intuition est autant mobilisée que mes sens.

Lorsque ma différence devient un fardeau …
« Pauvre malheureuse » voilà ce que j’entends souvent, quand ce n’est pas « inconsciente » qui me blesse plus que toutes les autres critiques de ma condition.
Ne suis-je pas libre de vivre en compagnie des voyants ? Ma vie est-elle moins importante qu’une autre puisque je suis aveugle ?
Dans la rue, je sens vos regards. Que vous compatissiez, jugiez ou admiriez, pour moi ils ne sont rien de plus qu’insistant et parfois gênant. Je ne suis pas être une bête de foire. Donc dirigez vos yeux emplis de pitiés mêlés de consternations ailleurs que vers moi.
Ne pensez pas à moi comme une handicapée où je vais voir rouge !

A chaque pas …
Une truffe fraîche et humide me touche la main.
Voilà mes yeux, mon fidèle Charlie, le chien dressé spécialement pour moi. Je le caresse un moment et attrape enfin fermement la poignée en plastique harnachée sur son dos pour qu’il me ramène à la maison. C’est mon guide et mon gardien.

Calcul élémentaire et œnologie …
De ma chambre, je compte dix pas jusqu’à la chambre claire et douce comme le printemps où ma petite fleur, toute sage, attend impatiemment que je vienne la câliner. Elle doit se tenir debout, une main potelée se tendant dans ma direction avec un heureux sourire aux lèvres que je devine par ses gazouillis fluets et l’autre fermement agrippée aux barreaux du lit. Comme tous les jours, elle est heureuse de me voir.
La porte d’entrée s’ouvre. L’odeur reconnaissable entre milles m’arrive aux narines. Mon mari est arrivé. Ma princesse dans mes bras, je longe le couloir puis arrive dans la cuisine en vingts trois pas précis. Ce soir c’est à lui de préparer le repas et je sais que se sera soirée pizza. Pas la peine de le cacher, je la sens. Il est piètre cuisinier.

Je sculpte mes souvenirs …
C’est l’heure du bain. Ma fille touche mon visage, du front au menton, laissant une trace humide au passage. Elle comprenait si bien ma situation et reproduisait mon moyen de l’admirer. Notre petit geste d’affection quotidien et rien qu’à nous.
C’est à mon tour maintenant.
De la main gauche, je commence par ses fins cheveux qui bouclent sur ses tempes d’une façon adorable. Ensuite je la passe sur son front haut puis la laisse descendre tendrement sur ses sourcils bien dessinés, ses joues rondes à croquer, son petit nez de lutin avant de caresser sa bouche mutine du pouce alors que mes doigts soulèvent son visage en forme de cœur. Je vois ma fille, derrière mes yeux ses traits se dessinent. Elle ressemble à son père. Agrippant mon cou, nous nous fîmes un bisou eskimo.

Et je rêve aussi …
Plus tard, tout ce petit monde couché, je pose ma tête sur la poitrine chaude de ma moitié d’où s’échappe battement de cœur et respiration. Une douce musique pour s’endormir. Et tout comme vous, mes nuits sont peuplés de songes, créé en odeurs, en sons, en sensations et par l’apparition de mes amours en négatifs, gravés à jamais dans ma mémoire.

Oui je suis aveugle et mon monde est une toile monochrome qui ne verra jamais d’autres couleurs que le noir.
Mais ce que je vois, ce que je ressens vaut bien ce prix.

Ma Vision des Choses. [mcld]

Ps: Rooh j'ai vu la grosse faute avant que tu ne la lise... La chance! XD
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MessageSujet: Re: [19] Aveugle.   [19] Aveugle. I_icon_minitime10/6/2012, 16:23

Akira : Bravo, c'est un texte très réussi ! (: J'ai vraiment aimé la sensation de "fouillis rangé" qu'il m'a laissé, de tourbillon. Après, je pense que tu pourrais l'exploiter encore plus loin, en y mêlant une histoire, par exemple, pour faire durer le plaisir de la lecture.

Black Rabbit : J'ai relevé quelques termes non adaptés à une personne aveugle : "chambre claire", "qui bouclent sur ses tempes d’une façon adorable".
"nous nous fîmes un bisou eskimo." Attention, tout ton récit est au présent.
Sinon j'ai bien aimé ton argumentation, la voix de ton personnage pour défendre sa situation.

Je pense que je vais essayer également (:
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MessageSujet: Re: [19] Aveugle.   [19] Aveugle. I_icon_minitime10/28/2012, 21:43

Rien ne coûte d'essayer.... Smile

On ne sait pas quand la vie peut basculer. On se dit qu'on vivra jusqu'à la mort, qu'on deviendra quelqu'un de respectée et de responsable cependant la vie est capricieuse la plupart du temps. Je le sais et pourtant je n'arrive toujours pas à m'y faire. Qu'est-ce que j'ai bien pu faire de mal? Voilà la question qu'on se pose quand notre vie est chamboulée. On ne se dit pas: " ouais, je l'ai bien mérité!" mais on se dit juste "pourquoi moi?" Alors, la réponse à cette question est simple: on est simplement des humains. Quoi, vous pensiez que c'était différent? Que parce que vous êtes beaux ou riches, vous êtes protégés? Quel crédulité!
Alors voilà mon histoire aussi magnifique qu'elle a pu l'être durant ces deux derniers mois.
Je suis aveugle depuis un accident en cours de physique. Un petit malin de ma classe avait trouvé que plonger le laser du lycée dans mes yeux était drôle. Ce qu'il n'avait pas su c'était que cela pouvait abroger la vue. En premier, on se dit que c'est normal si nos yeux nous font souffrir puis on se rend compte que non. Ce n'est pas normal du tout. Et puis tout commence. Le calvaire comme on dit.
Les médecins, qui disent qu'on va s'habiter à sa nouvelle condition, même si cela va prendre du temps. Je me souviens encore du baiser froid que ma mère à poser sur mon front après que le médecin lui ai murmuré, un peu trop fort, que je serais aveugle. Ma mère était le genre de femme digne, qui sentait bon la vanille. Avant mon accident, elle avait des progrès plein la tête pour nous, puis tout a changé. Elle est devenu froide et triste. Même si, je ne peux que lui toucher le visage pour savoir comment elle allait, je pouvais le sentir dans mon âme. Je pouvais effleurer sa tristesse comme si c'était la mienne. Ma mère me manquait depuis mon accident. Ma véritable mère, me manquait et c'était ça, le plus horrible dans mon état.
Les premiers jours, quand je suis revenue chez moi, je me suis sentie comme une étrangère. Je me cognais contre des objets qu'avant je n'aurais même pas toucher. J'ai brisé le vase préféré de ma mère et la seule chose qu'elle a dit c'était que je la débarrassais d'une chose encombrante. Une chose encombrante...voilà ce que j'étais devenue. Après les maladresses, on recommence à s'habiter à cet endroit qu'on a côtoyer durant toute sa vie: sa chambre. La mienne, me manquait tellement. C'était pire que de revenir d'un long voyage et de trouver son animal mort. La découverte de rien, était encore pire. Je savais qu'il y avait un lit, une bibliothèque bondée de livre que je ne pourrais plus jamais lire et une armoire. Cependant entre savoir ce qu'il y avait et connaître leur emplacement il y avait un grand fossé et j'ai eu la joie de le découvrir quand, j'ai fait ma bibliothèque tomber sur mon lit. C'était un moment fort désagréable pour moi et très comique pour ma mère.
Les jours se déroulaient si lentement qu'on voulait hurler à Dieu de nous abréger cette vie triste. Cependant, le Bon Dieu, ne nous accorde pas cette prière. Alors, j'ai fait ce qu'il fallait faire. J'ai continué à vivre. Aussi difficile que cela peut-être, je continue à me battre contre cette fatalité. Je suis aveugle mais pas encore morte. Cette résolution a enfin fait changer ma mère. Elle est devenu une genre de militante pour les droits des aveugles. Cela lui allait bien ce nouveau rôle, elle s'y complaisait. Je me souviens encore, aujourd'hui, de la première fois que j'ai posé mes doigts sur une feuille de braille. Je ne comprenais absolument rien de ce que ces points pouvaient signifier. Alors j'ai imaginé qu'ils racontaient l'histoire d'un chiot blessé qui se rend compte que même si il pleure, ou crie personne ne viendra l'aider. Alors pour se sauver, il se relève, il lutte de toute son âme et il avance, aussi faible qu'il l'est, il avance. Cette pensée, m'a fait sourire et pleuré en même temps. J'ai pu sentir le froid des gouttes sortir de ses yeux qui ne me servaient plus qu'à ça, pleurnicher. J'ai même pu sentir cette odeur salée qu'on les larmes. Avant aurais-je été capable d'en faire autant?
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Soane
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MessageSujet: Re: [19] Aveugle.   [19] Aveugle. I_icon_minitime7/10/2013, 17:55

Je peux essayer ? :3
Je me suis amusée à ressentir certaines choses en fermant les yeux pour éprouver des sensations... En tout cas c'était pas facile, mais je me lance !! What a Face 


Enfin ! Depuis le temps que j'attendais ce moment ! Je vais pouvoir sortir au dehors, et vivre ! Vivre pleinement, avec joie, et bonne humeur !
Des bruits sourds et saccadés, lourds mais trop léger pour être ceux de Père, trop excités et joyeux pour être ceux de Mère, alors ils n'appartiennent qu'à ma sœur cadette, Fanny. Elle monte des escaliers, voilà ma conclusion. J'arrive à reconnaître voir même à distinguer le bruit de ses genoux heurtant la marche supérieure, comme à son habitude.
Je sens le sol vibrer, elle se rapproche de moi, et un clang ! Sonore retentit quand elle fait irruption dans mon domaine, enfonçant la porte.
—Grand frèèèèèère ! C'est mooooooi !
—Je te reconnais facilement ! Je bredouille en me tortillant sous mes couvertures.
Le sol craque au contact des pieds de ma sœur, et son souffle qui m'ébouriffe mes cils m'informe qu'elle se tient tout près, très près, j'entends son cœur qui tambourine dans son corps.
—Debout grand frère, tu n'as pas hâte ?
—Si, très hâte.
Je sens de petits doigts m’agripper le bras, et un frisson désagréable, comme j'en ai toujours quand j'ai un contact physique avec quelqu'un sans être prévenu, court le long de mon échine.
Les doigts m'incitent à me redresser, de leur pression qui me serre la peau et me la pince.
Mes mains aveugles repousse les couvertures, et je pose prudemment le pied sur le sol.
Raide et brute, je sens de petites choses pointues sous mon orteil, des saletés, à n'en pas douter.
—Fanny, tu n'as pas fait le ménage chez moi on dirait.
J'entends un grognement rauque face à moi, et l'haleine de ma sœur me chatouille les narines.
Je suis presque traîné hors de la pièce. Oui, je sais que j'ai quitté mon enceinte à moi car l'oppression que je ressentait disparaît subitement, et un air nouveau, revigorant, m'atteint. La voix claire de Fanny sonne doucement près de mon oreille, pour m'avertir qu'il y a l'escalier droit devant.
Je crains toujours la descente, mais un appel irrésistible vers la liberté me bouche les oreilles sur mes inquiétudes de toujours. Fanny m'attrape plus fort sous les aisselles, crispée, ses doigts raides sont plantés tels des bâtons dans ma peau.
Je sais qu'elle descend quelques marches, car le vent fait des remous près de moi, et un grand vide se forme tout autour.
—Ne t'inquiète pas grand frère, je suis là.
Je sens sa main prendre la mienne, celle délaissée. Je la laisse faire, ses doux doigts mènent mes doigts aveugle sur la rambarde de l'escalier. Cette poutre lisse, dure et froide, de la même matière que les marches, et dont les impuretés du bois ressortent plus facilement sous le contact de mes pieds nus.
Je lève un pied, qui se balance un moment dans le vide de la première marche, le vent s'infiltrant entre mes orteils. Puis, c'est la chut au mot véritable, le pied tombe, tombe, tombe ! Et quand il heurte la deuxième marche, c'est tout le choc qui remonte jusqu'à mon cerveau, me faisant tanguer.
L'épreuve des escaliers est la pire de toute. Je suis en sueur quand j’atteins le bas, toujours marqué par un tapis moelleux au départ, puis devenu grattant et insupportablement piquant au fil des années.
L'espace restreint des escaliers, qui me donne la sensation que mes poumons sont oppressés, s'élargit partout autour de moi, me déstabilisant.
Je sens un monde inconnu s'élever de part et d'autre, les repères ayant disparus, je suis comme un bébé perdu dans l'immensité d'une praire vaste et noire.
Fanny me tire par le bras, et comme dans un labyrinthe de sons et d'odeurs diffus, me fait passer du salon à la salle à manger.
—Et le fromage tant promis alors ? Je marmonne.
—Comment as-tu sus que nous n'en mangerions pas grand frère ?
Je relève la tête et inspire profondément.
—La douce odeur du pain de viande, chaude comme ta  main, voilà ce que j'ai pus en conclure de notre repas de ce soir... Douce odeur de la viande cuisant à petit feu, mmh !
Fanny glousse, je l'entends obstruer le son de sa voix par sa main, envoyant ses ondes se cogner autre part que sur mes oreilles.
Nous nous dirigeons vers le jardin, c'est de là que je sens l'air s'engouffrer, et la vie respirer, un air chaud, doux, brillant.
—Tiens grand frère, des chaussures...
—J'en veux pas, je réplique en frémissant.
Je sais qu'elle s'est accroupie à mes pieds pour me les enfiler, mais je refuse. L'air me semble plus froid quand elle ne se tient pas face à moi.
—Pourquoi grand frère ? Tu vas attraper un rhume !
—Fais-moi plaisir, Fanny, je veux sentir l'herbe sous mes pieds, s'il-te-plaît !
Son soupire fugace épouse ma cheville et quand elle se redresse brusquement, mes sens en sont troublés.
—Il fait beau dehors, veinard ! Fais attention à la marche.
Dans mon élan, désire extrême que de me sentir libre, j'avance d'un pas et mon talon claque contre un rebord pointu et puis à nouveau, mon pied se perd dans le vide avant de se blesser contre une forme rugueuse et dure.
—Ça va grand frère ? S'inquiète Fanny (ses cheveux me chatouillent les sourcils).
—Aïe ! Je réponds.
Je m'accroche tout au bras de ma sœur, qui me hisse avec force sur mes pieds, ses muscles se contractant avec effort.
—De la pierre, Fanny, tu aurais pu me prévenir !
Je me tiens à elle, enfin libre. Son souffle chauffe ma nuque, elle a grandit depuis la dernière fois.
Un vent d'été, chaud et amical, m'enveloppe tout entier, et je me laisse bercer par le chant des oiseaux, le bruit de vaisselle des voisins à ma droite, les voitures très loin devant moi et le murmure des feuilles d'un arbre juste au dessus de ma tête.
Je tends ma main vers le haut. Je sais qu'il y a un soleil vif aujourd'hui. Je le sens me brûler les racines de mes cheveux, forcer les pores de ma peau, et s'imposer à moi, me brûlant les poumons.
Au dehors, je peux respirer librement sans que rien n'obstrue le passage de l'air.
Quand Fanny me conduit vers l'arbre, je tends ma main, pour sentir le vent jouer entre mes doigts, s'amusant à s'enrouler et à s'enrouler, encore et encore.
Je suis si surpris, ensuite, de sentir l'herbe sous mes pieds, que je reste interdis un moment, éprouvant un fantasme hors du commun.
Cette douce sensation, cette caresse légère, ces brins qui se glissent partout, et le chatouillement léger d'un insecte prit au piège.
Je soupire de plaisir, enfouissant mes ongles sous terre, rafraîchissante et douce, caressant de l'orteil la mousse me massant mon talon endolorit.
Fanny me laisse en plan par moment, vacillant comme sur le point de m'effondrer, elle part chercher des choses que je tâte, touche, caresse et retourne entre mes doigts. Des cailloux, de la terre, des feuilles, et, summum du summum, une branche d'arbre.
Rugueuse et pleine d'impuretés, et si différente du parquet de la maison. Cette branche raconte sa vie passée à la belle étoile, ses nervures, ses veines, ses creux que la pluie battante a creusés.
Je goutte de la sève, croque avec plaisir dans une mûre, laissant son jus exploser dans la bouche, et la salive attaquer mes papilles et dissoudre le fruit.
Le soleil enserre chaque parcelle de mon corps, et je transpire à grosse goutte, cette eau salée qui coule le long de mon dos, et je soupire.
—Qu'y-a-t-il mon frère ?
—Je suis aveugle Fanny.
—Oui, mais pourquoi le dire maintenant ? Tu es triste grand frère ? Triste de ne pas voir ?
—Non sœurette, je ne suis pas triste.
—Alors pourquoi soupirer ?
—Je suis au contraire très heureux, très heureux, vraiment très heureux d'être aveugle. On ne naît pas avec toute les qualités, mais je vais te dire quelque chose, (je me penche vers ce que je sens être ma sœur) Même si je suis aveugle, ça ne veut pas dire que je ne dois plus vivre, tout fait en sorte que je compense cet handicape.
—Je ne comprends pas grand frère ! (ses paroles glissent le long de l'arrête de mon nez)
—Ce n'est pas grave, Fanny, il n'y a rien à comprendre, je suis heureux, un point c'est tout.
—D'accord grand frère, d'accord.
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