Un petit nouveau

J’aurai dû m’appeler José Roberto Ribeiro Da Silva et habiter au Brésil, dans le Nordeste, mais un évènement est venu tout bouleversé. Lequel? Je ne sais pas mais il a poussé ma mère a m’abandonner et à me faire adopter. On m’a toujours dit que ma mère m’avait fait adopter pour que je puisse avoir une meilleure vie que celle qu’elle pouvait m’offrir. Pour un conte de fée, cette explication serait suffisante pour que le prince charmant ou le pauvre paysan est une vie hors du commun, mais malheureusement (ou heureusement?) la vie réelle n’est pas un conte de fée et cette explication ne me convient pas vraiment. Les jours où mon moral est a une bonne altitude, je me dit que mon père est un salaud qui a mis ma mère enceinte puis qu’il a fuit la queue entre les jambes comme un chien qui prend peur. J’imagine après ma mère essayé de survivre en espérant m’offrir le meilleur mais, que voyant la difficulté de la tache, a été contrainte de m’abandonner en pleurant toute les larmes de son corps. Puis il y a la version des jours où mon moral est en chute libre. Ces jours là, j’imagine que ma mère est une femme facile, vulgaire, à la vie dissolue, qui après quelques verres d’alcool couche avec le premier venu, ou pire, les premiers venus. Tombant enceinte sans son bon vouloir, vivant sa grossesse comme un long calvaire, accouchant avec soulagement d’un garçon (moi), fruit d’une histoire sans lendemain dans une minable et sombre ruelle. Je l’imagine me regardant avec dégoût et décider un bon jour, où elle n’a pas pu dormir à cause de mes pleurs, de m’abandonner à l’hôpital. Car oui, ma mère m’a laissé à l’hôpital mourrant de faim, avant que je sois recueilli chez l’avocate qui s’occupait de mon adoption. Depuis mon abandon qu’est devenue ma mère? Est-elle morte ou vivante? En admettant qu’elle soit encore vivante j’espère qu’elle a pu construire, ou reconstruire sa vie, qu’elle a eu d’autres enfants avec qui elle vit heureuse et qu’elle a un travail lui permettant de les élever convenablement. Mais, malgré ces espoirs, je suis conscient qu’elle est peut-être devenue une prostituée toxicomane ou la femme battue d’un minable vendeur de coke qui lui fait vivre, au quotidien, un enfer dans une favel glauque et puante.

Dans tous les cas, c’est très dur d’être un enfant adopter. Je suis condamné à vivre avec un passé nébuleux et à me poser une multitude de questions restant, pour la majorité, sans réponses. Beaucoup de gens ne comprennent pas ce que je ressens, car pour eux je ne manque de rien matériellement et j’ai une famille qui m’aime, mais ces gens ne savent rien. Ces instituteurs ignorants tout des traumatisme de l’adoption, ces profs arrogants préférant s’occuper d’élèves moins compliqués que de chercher à me comprendre, ces éducateurs se permettant de juger avec un simple dossier scolaire ou bien encore ces psychologues incompétents qui ne pensent qu’au chèque que vont signer des parents désespérés par leur rejeton. Mais j’avoue que là je suis un peu mauvaise langue, je ne site que les mauvais exemples.

Je me rend compte que je n’ai toujours pas écrit mon nom. Je m’appelle Denis depuis la veille de noël 1990, jour où je suis arrivé en France à l’aéroport de Toulouse. Ce jour dont je n’ai aucuns souvenirs mais qui, pourtant, a marqué toute ma famille. J’étais bébé mais je pense que ce jour là quelque chose en moi s’est brisé. On m’a arraché à la pauvreté mais aussi à un pays et une culture. Aujourd’hui je ressens comme un vide, un manque. On a changé mon nom, ce qui est normal puisque je changeais de famille, mais on m’a aussi changé de prénom, seul chose que m’avait donné ma mère, seul souvenir que j’avais d’elle, dernier lien avec ma famille biologique, seule trace de la culture et de la langue du pays de ma naissance. On a effacé un an de ma vie et on m’a fait recommencer à zéro, comme si la première année de mon existence était une tâche qu’il fallait effacer.

Si mes parents adoptifs avaient su ce que je serai devenu ils ne m’auraient, peut-être, pas adopté et aurait sans doute recueilli un autre enfant qui méritait plus cette chance que moi. Car oui, une des questions que je me pose très souvent, trop souvent, c’est: Pourquoi moi et pas un autre? Puis souvent quand je me pose cette question, d’autres suivent: Est-ce que je mérite cette chance? Est-ce vraiment ici ma place? Je vis avec ces interrogations dans ma tête depuis des années et je n’ai toujours pas les réponses. Et la plus importante de ces questions c’est: Qui suis-je vraiment? Je n’ai aucune légitimité dans ma famille adoptive car je ne suis pas l’enfant de mes parents. Je suis différent de mes cousins, de mes cousines. Différent par la couleur de peau et par le sang, différent aux yeux des gens. Je suis l’enfant de ma famille biologique et celui de ma famille adoptive, mais en même temps, je ne suis pas réellement un enfant de ces familles. Je peux donc dire que je suis, à la fois, l’enfant de tout le monde et celui de personne. Je suis né de parents brésiliens mais j’ai grandi avec des parents français, je suis né au Brésil mais j’ai vécu en France. Je ne sais même plus de quel pays je suis tel un apatride.

Je ne me souviens plus quand mes parents m’ont dit que j’avais été adopté, mais j’ai l’impression de l’avoir toujours su. Quand j’étais à la maternelle, je pensais que comme mes parents étaient venus me chercher au Brésil, ils pouvaient m’y renvoyer si je ne leurs convenais plus. C’est très bête ce que l’on peut croire quand on est un enfant. Le plus dur à supporter quand on est un enfant adopté, c’est le regard des gens. Quand j’étais petit, d’autres enfants me disaient que mes parents n’étaient pas mes parents. Le pire, c’est que j’ai fini par les croire, par m’en convaincre. Ils n’étaient pas mes parents, ils n’étaient pas ma famille. Il croyaient m’aimer mais ils aimaient celui qu’ils auraient voulu voir à ma place. Ils se rendraient compte que je ne pouvais pas être leur fils.

Je n’aime pas la vie, je n’aime pas le monde dans lequel je vis et même pire, je ne m’aime pas. Je ne suis pas vraiment beau, pas vraiment moche. Je ne suis pas maigre, j’ai même quelque rondeurs. Je suis métis, j’ai le crâne rasé, des piercings et un tatouage au cou. Je suis dépressif, torturé et nostalgique. Ma seule qualité, et aussi mon plus gros défaut, c’est que je suis intelligent, très intelligent. Je suis surdoué, ce qui m’a rendu prétentieux pendant longtemps et même encore un peu maintenant malgré mes efforts. Pourtant l’intelligence n’est rien dans la vie, comme mon père disait, c’est l’intelligence du cœur qui compte. Je ne lui ai jamais dit mais c’est la meilleure chose qu’il a pu m’apprendre. J’ai mis du temps à comprendre ce qu’était l’intelligence du cœur, je l’ai compris grâce à des personnes formidables que j’ai eu la chance de rencontrer. Sans elles que serais-je devenu? Je me serrais, sans doute, entêté à croire que mon orgueilleuse intelligence faisait de moi un être supérieur jusqu’au jour où la réalité m’aurait remis les pieds sur terre avec violence.

Quel programme! Bienvenue en tout cas.

Bienvenu sur SD.
Tu as une présentation peu commune, il faut l'avouer. Néanmoins, elle m'a plut. Pas parce que ton histoire est peu banale, mais parce qu'elle est racontée avec tant de franchise qu'il est dur de rester stoïque. C'est inhabituel que les gens se livrent ainsi, sur une simple "fiche de présentation".

Nous aurons sans doute l'occasion de nous recroiser. Je laisse aux autres le soin de te poser des questions sur tes musiques et lectures préférées ou de te rappeler les règles du forum et te salut !

à bientôt.

Bienvenue sur le forum !
Présentation assez "originale" on va dire ^^

Quels sont tes goûts niveaux musique et littérature ?

J'espère que tu passeras de bons moments ici

J'avoue m'être repris à deux fois pour la lire. Tête ailleurs, pas vraiment concentré, fatigué alors je n'ai pas pris la peine de poursuivre. J'avais eu tord, c'est très jolie, un texte noir, mais avec certaine espérance en fin de récit. Ce qui m'impressionne c'est la lucidité et le discernement avec lequel tu évoque tout cela.
Bref Bienvenue à toi, puisse tu te plaire ici, que tu trouve ici du plaisir et de quoi t'épanouir.
Au plaisir de te lire.

Premièrement, bienvenu parmi nous =) Je suis sûre que tu te plairas bien ici.
Deuxièmement, j'avoue que ton histoire (la tienne, je parle de ta présentation qui te représente et que t'as mis en histoire... Ok laisse faire je me comprend ! XD) m'a vraiment, mais vraiment énormément touché. J'ai même versé une larme ._. (faut dire que ça m'arrive pas tout les jours !) On voit déjà ton style d'écriture et je sais que je vais déjà aimer tes histoires ou poèmes ou nouvelles ou whatever you going to write ! J'veux juste te dire aussi que la dépression ça se guérit, ça se répare et se rafistole. Et les meilleures personnes pour t'aider à en sortir, c'est ceux que tu aimes le plus au monde. =) (la fameuse crise existentiel est une maladie qui se guérit aussi avec le temps xD pour l'instant je suis correcte mais je pense que cela me frappera tôt ou tard alors...) En bref, tu as une personne compatissante de l'Amérique du Nord ! (tu t'en attendais pas, avoue )
Au plaisir de lire un texte un de ces jours !
(ouf, je crois qu'il faudrait que j'aille faire un tour sur l'ordi moi...)

Merci pour vos message.
Pour répondre à vos questions je suis fan de Bukowski en littérature et en musique j'écoute un peu de tout du moment que ça m'inspire.

Welcome à toi mon vieux!

J'ai une question :3 Est-ce que tu joues d'un instrument !

Juste une petite précision Laïla, la dépression c'est différent de la crise existentielle adolescente. Et petite précision 2, la dépression ce n'est pas forcément une vision du monde négative, ou même une incompréhension du monde, il y a des dépressifs qui ne savent pas qu'il le sont. C'est une maladie multiple. ( c'est l'étudiant qui parle là, je m'étais juré de ne plus reprendre les gens sur le sens des mots! Suis désolé c'est plus fort que moi x) )

Mais la plupart du temps, quand t'as une crise existentiel, ben t'arrête pas de te poser de question du genre "Pourquoi je suis ici ?" Il me semble que même si on est adulte, on peut avoir une crise existentiel et la plupart du temps, ça occasionne la dépression... Mais tu n'as jamais remarqué que quand une personne est dépressive, elle se pose souvent des questions sur elle et sa vie... En tout cas... On a juste pas le même point de vu ^^

Bienvenue sur le forum! Si c'est ton histoire qui t'as amené à apprécier l'écriture, j'imagine que tu as beaucoup de chose à raconter! Passe un bon moment ici en tout cas

Pour répondre à Laila, je ne joue d'aucun instrument. Et pour répondre à Forgot -my-pen (j'espère ne pas me tromper sur les noms) oui ma vie a toujours inspiré mon écriture mais il y a toujours une part de fiction dans ce que j'écris. J'ai posté un petit texte dans "nos texte-divers" qui s'appelle "Dernière lettre avant une fin" si ça peut vous interresser.
Sur la dépression, oui ça se soigne mais je tire mon inspiration de mes souffrances donc j'ai appris à vivre avec.

Bref merci pour vos messages. Et je pense qu'on se reparlea régulièrement.

C'est le principe de la fiction : s'inspirer de la réalité, en faire quelque chose de nouveau qui permet d'aborder autrement la réalité...
L'écriture, contre la dépression, ça marche bien !! Ça a toujours soigné mes coups de blues en tout cas.
En tout cas, ton histoire est merveilleusement racontée, et tu sembles avoir vraiment de conscience de ce que tu es... Preuve de maturité. Merci pour ta franchise, déballer ça sur un forum public, c'est... "ballsy"
Au plaisir de te croiser dans une des nombreuses rues mal éclairées de ce forum rempli de tarés en tout genre : des rêveurs, des poètes, des alcooliques, des démons-bisounours et autres genre de dégénérés mentaux, néanmoins très gentils et qui mordent pas (trop).